Le contrat didactique
En effet, ce concept ne fut élaboré que quarante ans plus tard par G. BROUSSEAU. Et ce sont plutôtles trois concepts fondamentaux d’enseignement, d’apprentissage et de signification que WITTGENSTEIN interrogeait alors. Ces trois notions sont aujourd’hui au centre des préoccupationsdes didacticiens et sont, nous le verrons, constitutives du contrat didactique.
Certains pourront considérer que nous présentons ici un essai d’épistémologie normative (au sens défini par I. STENGERS, 1987, 10) ; mais il convient surtout d’y voir une tentative d’organisation, diachronique et synchronique, des usages ou des significations attribués au concept de contrat didactique. Après avoir défini le contexte épistémologique dans lequel il émergea, nous tenterons de mettre en évidence à la fois son pouvoir explicatif et sa valeur heuristique, mais aussi les remaniements - inéluctables ? - liées à l’extension de son usage dans diverses communautés.
A cet égard, il conviendra de distinguer les raisons internes et externes des adaptations qui en découlent.
Naissent-elles de la nécessité d’améliorer les moyens d’intelligibilité du fonctionnement des situations didactiques, ou s’agit-il seulement d’adaptations techniques, non contrôlées par la théorie, au service de certaines idéologies pédagogiques ? Les visées praxéologiques ou les tentatives de vulgarisation procèdent, selon nous, de cette dernière démarche. Elles conduisent, le plus souvent, à canoniser des concepts théoriques dans des acceptions techniques ou injonctives sans jamais interroger, ou même évoquer, la légitimité de ces glissements sémantiques.
Cet usage des productions de la didactique fondamentale1 permet de donner l’illusion de satisfaire, à bon compte, aux exigences socio-politiques d’optimisation des pratiques d’enseignement. Derrière ces dérives conceptuelles se profilent des conceptions normalisantes et technicistes de la didactique qui sont trop hâtivement assimilées à des productions de la didactique fondamentale et critiquées, à tort, comme telles (BARRA, BRAUNS, 1992 ; BOILLOT, LE DU, 1993).
Cette utilisation idéo logique de la didactique, à tout le moins de ses concepts, doit être soumise à un travail de recadrage épistémologique, comme nous y invite P. CLANCHÉ (1994, 231), ou de « dégraissage », pour reprendre ici l’expression de G. BROUSSEAU (1994, 63), « afin de favoriser la communication et le positionnement de ces concepts par rapport à des résultats de domaines voisins.
C’est donc d’un point de vue et d’une échelle, nécessairement partiaux, que nous nous attacherons à présenter ici ce que nous pourrions appeler une « géographie conceptuelle » du contrat didactique. Cette tâche, certes ambitieuse, nous paraît d’autant plus nécessaire que la formation des professeurs semble aujourd’hui céder à une économie conceptuelle quitendrait à s’affranchir, par ce réductionnisme techniciste, de la complexité inhérente à toute relation didactique.
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